Hate.Machine :: lancement vidéo
Innovations en concert est emballé de presenter Hate.Machine, la plus récente composition pour l'Ensemble Growlers de Pierre-Luc Senécal. Après la ténébreuse et ambient The Dayking, l'Ensemble Growlers s’est lancé, en plein temps de pandémie, dans la réalisation d’une œuvre féroce et sulfureuse. À la jonction entre death métal et expérimental, Hate.Machine corrode et corrompt les codes éprouvés du métal au moyen de techniques de mixage et de conception sonore propres à l’électroacoustique.
L’inspiration pour ce projet provient d’un reportage sur la culture de violence de l’Internet. Diffusé sur le canal Fox en 2012, le reportage représente le Web comme une sorte de Far West virtuel où aucune règle n’existe. Dix ans plus tard, alors que les conséquences néfastes des réseaux sociaux et des fake news se font ardemment sentir, rien n’a vraiment changé. Quel lien existe-t-il entre l’entité abstraite qu’est cette fameuse «toile» et Hate.Machine? Après tout, l’œuvre est ancrée à première vue dans les clichés de la musique métal. Une effroyable machine, mi-robot, mi-parasite, mastique, déchire et déchiquète tout sur son passage. Une seconde lecture révélera le véritable enjeu de l’œuvre : la critique d’une société dépendante de l’Internet, et de fait orientée vers la consommation d’images morbides, la haine de soi et l'érosion des valeurs morales. C’est cette métaphore qui donne un sens niveau à la seconde moitié du texte, où les innombrables victimes, loin de fuir, s’approchent volontairement de l’engin terrible, avides d’être dévorées et digérées par ce dieu qu’elles adorent.
Grâce à toute une équipe de vidéastes et d'artistes musicaux de talent, l'Ensemble Growlers a réussi un petit exploit : réaliser une œuvre audiovisuelle avec 14 growlers en plein confinement. Déterminé à faire preuve d’innovation et d’adaptation, et malgré des moyens modestes, chaque membre s’est filmé et enregistré individuellement à partir de son domicile pour livrer un produit hybridant l’art vidéo et le vidéoclip. Entièrement filmées avec un téléphone cellulaire en mode selfie, les images de basse résolution ont été traitées afin d’amplifier les artefacts de compression numérique. Les effets de dégradation de l’image des visages deviennent alors un symbole de l’effet de l’Internet sur notre identité, de cette «machine» qui infiltre nos vies. Cette méthode renvoie implicitement aux format «mosaïque» télé-rencontres et conférences Zoom qui sont devenus le symbole de la pandémie, du confinement et de la dégradation des normes sociales qui s’ensuivirent. C’est là l’ironie même de Hate.Machine. La réalisation de l’œuvre aurait été impossible sans l’Internet qu’elle critique.